Les types de la brigade mondaine l’avaient suivi depuis une petite taule de la rue André Antoine, à Pigalle. Je crois que c’était en trente-cinq, au début du printemps. Je me souviens que le grand patron, c’était le préfet Roger Langeron. L’année précédente, Jean Chiappe, Préfet de Police, et sa traditionnelle écharpe blanche, avaient quitté la scène. Le préfet avait été démis par Edouard Daladier. Il s’en était résulté un foutu bordel, avec manifestations de la clique d’extrême droite, camelots du Roi compris. On se serait cru dans un autre pays. Je crois même que la république avait quelque peu vacillé sur ses fondations. Il y avait eu quinze morts. On avait peut- être échappé au pire…j’évitais d’en parler pour ne pas raviver des rancœurs qui remontaient à ce triste 6 février…chez les poulets, on n’était pas tous d’accord, le reste était une question de foi ou de croyances. Pour les anciens, ceux qui n’étaient pas du côté de l’ordre…étaient, nécessairement, du côté du désordre….
On m’avait dit que Chiappe était proche de l’extrême-droite, et avait réprimé durement les manifestations de communistes, moi, ce que je voyais, c’est qu’il avait réussi à fournir du travail à des tas de femmes de flics, devenues concierges dans des immeubles parisiens, et puis moi, la politique, je m’en foutais un peu. Ma passion, c’était la « Grande Maison ».
Cette affaire-là, c’était avant la guerre, ça, je suis formel… La taule en question était dans le haut de la rue, en allant vers le nord. C’était un quartier que les voyous, les petites frappes, les julots, affectionnaient particulièrement. Le partage des territoires était déjà de l’histoire ancienne, mais de temps à autres, il y avait un dérapage, avec du raisiné, des douilles vidées, du déplacement de substitut du proc, du commissaire principal avec pipe et chapeau mou, mais en général, c’était plutôt calme, une sorte d’accord non-formel entre la poulaille et le monde des hors-la-loi. Tant que personne n’attrapait un coup de chaud, les choses se déroulaient plutôt bien. Bien sûr, il fallait rééquilibrer de temps en temps, quand les Corses prenaient trop de place, que les filles des Stéphanois volaient des mètres carrés de bitume, ou qu’un petit malin ouvrait un bar sans en parler à ceux qui tenaient les rênes du quadrilatère où se négociaient le cul, la chnouf, les petits paris entre amis avec chevaux dopés, à Vincennes ou à Auteuil.
Le patron avait mis des cadors sur le coup, mais, entre la descente de la rue Duperré, puis de la rue Mansart, et la suite de la filoche sur la rue Blanche, un peu plus large, ils avaient déjà perdu le client trois fois…alors, cadors, mon cul, non… ?
Heureusement, Léon Bricourt, que le bas peuple du « 36 » avait surnommé « P’tit Léon », à cause de sa taille, avait planqué juste à côté de l’Eglise de la Sainte-Trinité et, en voyant passé le voyou tout seul, il s’était demandé pourquoi Tony-Pieds-Plats n’était pas suivi de près. Il avait tout de suite flairé l’embrouille : « les cons, ils ont dû se faire semer… » …avait-il pensé, comme s’il n’avait jamais été convaincu des qualités professionnelles de ses collègues, plus jeunes, et moins aguerris, bien sûr. Pour nous, Léon Bricourt était « le major », un nom affectueux qui soulignait la propension qu’il avait à commencer toutes les histoires de son passé, vraies pour la plupart, quoi que, en disant : « il y a longtemps, quand j’étais major de police… ».
Heureusement, dans un réflexe typiquement poulaga, et comme c’était un vieux de la vieille, en fin de carrière, qui connaissait toutes les ficelles du métier, il avait tout de suite pris en chasse le marlou, pour voir où il se rendait. En trois minutes, Bricourt avait finalement réussi à se placer dans le sillage de Tony, qui devait avoir un sixième sens, parce qu’en traversant la rue de la Michodière, flairant peut-être qu’il était filoché, « Pieds-Plats » s’était soudainement retourné, craignant de trouver dans son champ de vision quelques piétons dans des imperméables signés « quai des Orfèvres ». Au même moment, un inspecteur du service de l’anthropométrie, planqué dans la charrette à bras d’un bougnat, avait réussi à prendre un cliché.
Pendant les deux secondes qu’avait duré sa volte-face, le malfrat n’avait vu que des bourgeois avec bobonnes, une bonne sœur à cornette, un garçon de course de la Société Générale, et un employé de la compagnie du gaz avec une sacoche en cuir.
(Tony-Pieds-Plats était-il suivi ? Le savait-il?, il s'était retourné, craignant de trouver dans son champ de vision...)
L’employé de la compagnie du gaz était Léon Bricourt, dans la sacoche se trouvait un Browning modèle 1910, le pétard de service affectionné par la maison. C’était juste au cas où, car on ne défouraillait pas en plein Paris, sauf quand et si, le braqueur, le voyou, avait de son côté, sorti un feu avec l’intention évidente de dessouder du monde. Perdre encore une fois de vue le Tony en question, ça l’aurait pas fait. On savait qu’il y avait quelque chose de pas clair qui se dessinait dans son horizon de margoulin, mais personne n’avait encore ni compris, ni trouvé même le début d’une piste. Il avait été vu avec des mecs en smoking, dînant chez Maxim’s, aperçu deux semaines plus tard à l’hippodrome de Vincennes, avec deux députés et un des questeurs de l’Assemblée Nationale. « Tony-pieds-plats » s’était même payé un week-end au Normandy, à Deauville, avec poules de luxe, menu à trois-cent-francs, et chauffeur de maître pour ramener tout le monde à Paname. Pour une petite frappe plus habituée aux bas-fonds Parisien, qu’aux palaces de haut-de-gamme, quelque chose ne collait pas. Le patron avait dit simplement : « collez-lui aux basques. Regardez où il dépense son blé. On dirait qu’il a gagné à la Loterie Nationale. Il y a quelque chose, Levkovitch, il y a quelque chose…je le sens… » …
Alors, depuis un bon moment, on filochait « Tony-pieds-plats ». Tu dis ? Le surnom ? Ah, oui…en fait, le Tony en question avait été réformé en quatorze. Incapable de défiler au pas, inapte pour se faire trouer la peau. Le surnom était resté. C’était un petit tapin qui nous avait affranchi. On lui avait mentionné le prénom et le nom de l’homme lors d’un interrogatoire, elle nous avait répondu, « Ah, oui, Tony-pieds-plats, vous voulez dire… »
Il y avait beaucoup de coups de pot dans le métier. Il y avait aussi, bien sûr, des machins qu’on foirait parfois, ça se jouait à peu de choses, un voyou en mal d’amour qui faisait un crochet par un bobinard avant d’aller braquer, alors ça te foutait par terre ta surveillance, ou bien un embouteillage qui te bloquait dans la circulation, surtout dans le quartier où nous passions le plus clair de notre temps, ou encore, cela m’était arrivé, le client qu’on pistait qui décidait soudain, sixième sens ou autre, de sauter dans un taxi…et de se faire la jaquette, alors toi, comme un con, tu te retrouvais marron, sur les pavés de Paname, obligé de rentrer à la boutique , et d’expliquer à ton « principal » pourquoi tu étais revenus bredouille.
Nos vies se déroulaient entre Opéra, le cimetière Montmartre, la porte de la Chapelle, et la Gare de l’Est. On faisait quoi ? On chassait le voyou, mais nos clients étaient des voyous de haut vol, pas des petits marlous de bas étage, des demi-sel qui auraient prostitué leur sœur, ou même, pour certains, leur mère. Quand je dis qu’on chassait le voyou, ce n’était pas « l’apache » des fortifs, la petite frappe de Montmartre, le demi-sel qui devient, facile, un bon indic, dès que tu le secoues un peu…On privilégiait les vrais caïds, ceux dont on savait qu’ils avaient une place de choix, entre le milieu et le haut de l’échelle de la voyoucratie. On en connaissait certains pour les avoir serrés à deux ou trois reprises, qui étaient ensuite devenus des relâchés pour vice de procédure, des « non-lieux », des innocentés à force d’efforts des avocats marrons. Sans dire qu’on s’estimait, il est sûr qu’il y avait une sorte de respect. Chacun, dans sa profession, connaissait les règles du jeu. Chacun s’arrangeait pour être gagnant le plus longtemps possible, jusqu’au jour où….
En dehors de la traque des malfrats impliqués dans le jeu, la prostitution et le trafic de coco, l’extorsion, le chantage, et autres joyeusetés, notre fonds de commerce était surtout la surveillance discrète de gens connus, politiciens, financiers, capitaines d’industrie, qui gravitaient en cachette autour des tordus de la jambe en l’air. On savait qu’ils se donnaient du bon temps en fréquentant des princes du vice consenti ou obligé, des organisateurs de réjouissances par devant comme par derrière, des rois du petit train de Shangaï, qui donnaient par la baguette, ce qu’ils recevaient par le tambour.
Si ces quidams avaient été des gens du quotidien, personne n’aurait été à l’affut, mais certains de nos clients, supposés être des modèles de vertu qu’on pouvait citer dans les écoles de la république, bossaient pour le gouvernement dans la journée, dirigeaient des grandes entreprises liées d’une façon ou d’un autre à l’Etat, et se transformaient, le soir tombé, en débauchés de la pire espèce. Tu vois, c’était un peu « l’élite de l’élite » qui formait notre clientèle
Il y avait du smoking chez hommes, des dessous de soie, chez leurs épouses ou leurs maîtresses, quand, du moins, elles en portaient.
Mon parcours à moi, tu demandes ?
Ah, oui…J’étais arrivé à « La Mondaine » à la suite d’un concours de circonstances. A un moment, Il avait fallu faire un choix entre Alger, avec un poste de Commissaire Principal, ou bien la Mondaine, avec un bureau plus grand au « 36 ». Moi, en dehors de la Grande Maison, mon amour véritable, c’était Paname, le pavé luisant des jours de pluie, les nuits crasseuses de novembre, les dimanches silencieux de permanence dans mon bureau sous les toits, avec tabatières ouvertes pour laisser s’évacuer la fumée de cigarette accumulée pendant les gardes-à-vue. En montant sur une chaise, je pouvais voir la fontaine St Michel de ma jeunesse.
J’aimais les moments passés dans le sillage des grands voyous, j’aimais le chant des merles au Vert-Galant à l’aube d’un juin ou d’un juillet. Alors tu comprends, quand le moment de choisir entre le grand soleil d’Alger la Blanche, avec vue sur la mer, mais nostalgie de Paname, et rester sur l’Ile de la Cité, il ne m’avait pas fallu longtemps pour donner une réponse. Tant pis pour le tableau d’avancement.
Moi, les histoires de morale, je m’en foutais un peu. Pour moi, les gens se faisaient reluire comme ça leur plaisait. Le plus satisfaisant, c’était la traque, suivre sans être pris, se fondre dans le paysage, laisser au voyou l’illusion qu’il est en sécurité. Dans ma vie hors du «36 », je n’aurai jamais pourtant pris en main un fusil et poursuivi un gibier à quatre pattes, un vrai gibier….
A quatre pattes, tu dis … ? quoi que……
Moi, un flic exemplaire ? tu rigoles…Jamais de la vie …Ce n’était pas la soif d’exemplarité, les « valeurs chrétiennes » de l’ancien ordre moral de la fin dix-neuvième, l’envie de servir mes semblables, qui m’avait amené chez les poulets…J’avais tellement ressemblé à un malfrat que, si j’avais été croyant, c’était l’enfer qui m’aurait attendu…
Les bordels, le Chabannais, le Sphynx, le 2 rue de Londres, l’Etoile de Kléber, toutes ces boites à rideaux, ça me faisait rigoler. Te dire que je n’y mettais jamais les pieds, ce serait mentir, mais c’était des trucs un peu trop chics, et surtout un peu trop cher. J’aimais bien le simple, le bon endroit, qui irait bien avec moi. L’odeur de Vétiver dans un petit salon plein de promesses…
Ma préférence, c’était une petite taule en filigrane de la vie Parisienne, un truc pour initiés, tu n’y étais admis que sur recommandation, et ton « parrain » s’engageait aussi sur ta conduite, un bon compromis. Tu pouvais te laisser aller à ton imagination, mais tu savais aussi où se trouvaient les limites à ne pas dépasser parce qu’avant d’être admis comme membre, tu signais une sorte de « règlement intérieur de l’établissement » puisque nul n’était censé ignorer les règles, et qu’en plus, tu avais droit à une période probatoire de six-mois avant d’avoir la clé des lieux. Quand on avait jugé que tu étais suffisamment gentleman, la direction du lieu organisait un petit dîner, en présence de ton parrain, au cours duquel on te remettait une clé numérotée qui te permettait de rentrer, quand tu le souhaitais, dans ce petit paradis du cul tarifé, où officiaient trente-trois filles aux talents divers.
A la première incartade, c’était un rappel à l’ordre de la propriétaire des lieux, ou de son mari, qui prévenait aussi celui qui t’avais fait entrer dans le cercle. Il n’y avait jamais de deuxième incident, ça se réglait entre gens bien élevés, je te le dis. Tu as peut-être connu, toi aussi, c’était le « Paris-Saïgon, une gentille maison au fond d’un jardin, dans le quartier de la Muette. Le taulier était un ancien flic du Tonkin, rentré en métropole suite à un scandale qui avait impliqué la femme du gouverneur.
La république aimait bien les histoires de cul, mais n’osait pas trop étaler devant les électeurs, les turpitudes des puissants, alors on lui avait offert une retraite anticipée et une bonne pension, en échange d’un silence qui en disait long sur les tenants et aboutissants de la vie coloniale des hauts-fonctionnaires. Comme il avait un carnet d’adresse long comme le bras, il avait monté son business…Quand tu y venais en été, tu pouvais entendre, depuis la cour, le raffut exagéré des ébats tarifés, avec des petites morts simulées qui devaient plaire, puisqu’il y avait début trente-cinq, plus de soixante-dix postulants qui attendaient d’être parrainés pour se mettre à fréquenter l’aimable maison close. A chaque fois que j’y allais, pour boire une absinthe, une chartreuse ou un St Raphael, ou même pour m’offrir quelques heures de rêve sur fond d’Indochine, je rigolais tout seul. La taule en question se trouvait rue de l’Assomption, à l’endroit même où, autrefois, s’élevait un couvent. Blanche, la taulière, était déjà en train de passer la main à la fille de son premier mari, une petite rousse qui te gérait la boutique avec maestria, laissant à la patronne le privilège de compter les biffetons.
Mais les ballets roses ou bleu, là, j’pouvais pas comprendre.
En mille-neuf-cent-trente-et-un, j’avais fait arrêter deux députés, dénoncé par un électeur. Curieuse histoire, aussi, les deux politiciens s’étaient fait faire aux pattes à la Closerie des Lilas, le restaurant chic ouvert en 1847 par François Bullier. A leur table se trouvaient trois enfants de chœur de Saint Sulpice, âgés de onze, quatorze et quinze ans. Un vicaire de la paroisse avait avoué par la suite avoir été sollicité par « des hommes d’influence » pour « fournir de jeunes garçons » Très commodément, l’homme d’église avait été retrouvé, trois jours plus tard, noyé dans le bassin du Jardin du Luxembourg, à onze-cent-mètres à peine de la sacristie de son église baroque…
Les puissants avaient réussi à étouffer l’affaire en échange d’un don significatif à l’Orphelinat de la Police Nationale. Certains avaient été choqués, d’autres attristés, la presse s’était déchaînée, mais comme il n’y avait pas de véritable flagrant délit, avec pantalon sur les chevilles et descente de police, le machin s’était dégonflé en deux semaines. Les parents des trois enfants étant des grenouilles de bénitier, ils avaient considéré cette triste affaire comme une épreuve envoyée par le ciel pour éprouver leur foi, et s’en étaient rapidement retournés à leur missel vespéral romain, et leurs Deo Gratias…
J’étais un flic rebelle, mais comme le temps passait pour moi, comme pour les autres, J’avais déjà fait treize ans de « mondaine ». C’était différent des délits financiers, ou je travaillais avant, avec des flics comme il fallait, bien polis, bien sapés, qui bouffaient du pot-au-feu, ou de la langue de bœuf dans les petits restaus autour du « 36 », rive gauche comprise.
Des histoires sur les turpitudes des hommes, j’en avais plein mes classeurs. Des classeurs où somnolaient de sinistres affaires de mœurs, de chantage aux photos de cul, j’en avais des kilos dans mes placards, et quand je n’avais plus de place pour stocker la paperasse et les clichés en noir et blanc, tirés sur papier glacé pour mieux voir les détails, je descendais un étage pour voler, au service des garnis, les uns ou deux mètres carrés supplémentaires, nécessaires à la conservation des histoires de cul.
La racine des cheveux commençait à gentiment blanchir. J’avais fait mon deuil de mes meilleures années. Je ne m’étais même pas étonné de n’être pas marié. J’avais simplement fait ce que j’avais dû faire, suivi la route que je devais suivre, et mis derrière moi, loin derrière, les questions qui auraient pu me faire douter…Mon parcours m’avait bien plu. Je n’avais pas voulu être flic. J’aurais préféré un petit étal de livres à vendre, de gravures coquines, sur le quai Voltaire, avec pipe, gentil chien couché sous mon fauteuil en toile, et ma canne à pêche pas loin…mais ça, c’était du rêve. En longeant la Seine en direction de l’ouest, j’avais engagé la conversation avec une bouquiniste. Elle s’appelait Muriel, avec une seule aile, avait-elle précisé en se marrant. « Je brocante des bouquins les week-ends, mais le reste de la semaine, j’aide les gens. En fait, je suis thérapeute holistique » avait-elle dit, alors que j’essayais de négocier l’achat d’une « Vie du Marquis de Sade », dans une édition numérotée… « je peux voir votre aura » avait-elle ajouté, avec un mystérieux sourire. J’étais reparti avec le bouquin payé cinq francs, au lieu de vingt, et le sentiment d’être apaisé.
Même si j’étais seul, il fallait bouffer, alors j’avais fait des petits métiers : chasseur à l’Hôtel du Palais d’Orsay, taxi à la G7, égoutier, jardinier de la Ville de Paris, huissier au Sénat, peintre en bâtiment sur la Tour Eiffel, machiniste à la STCRP (1), serveur au Zeyer, place d’Alésia, où un soir, j’avais rencontré Alice, une petite femme qu’on aurait cru sorti d’un roman de Zola.
Elle avait commandé une daube, je lui avais apporté un homard, elle avait ri, moi aussi, on s’était arrangé pour se retrouver devant le Lion de Belfort, place Denfert. Comme il y avait eu des affinités, que j’étais seul, et elle en manque, on avait rapidement rejoint mon univers de la cité Hannibal, une petite maison bâtie fin dix-neuvième, dans un tranquille cul de sac du quartier du Petit-Montrouge, à deux pas de l’église Saint-Pierre.
C’était le reste d’un héritage. Mon vieux avait fait fortune avec des actions d’une étrange compagnie fondée par un certain Nagelmackers. Quand il avait passé l’arme à gauche, l’état s’était bien servi, mais il y avait eu du reste, caché aux yeux du monde. Cent soixante mètres carrés, pas beaucoup de lumière. C’était intime, pas très loin de la Brasserie de la Nouvelle-Gallia, c’était silencieux, on pouvait voir un bout de ciel, cela me suffisait.
Ma gentille « Nana » du Zeyer était veuve d’un poulet qu’elle n’aimait pas et qu’elle avait aidé à partir vers un monde meilleur, avec l’aide de trois ou quatre voyous Corses. Elle m’avait raconté son histoire après une bouteille de Juliénas. J’avais juré de ne rien dire. Croix de bois, croix de fer…mais elle n’avait rien contre les flics, et c’est elle qui m’avait suggéré d’essayer les concours qui allaient bien, pour rentrer dans la Grande Maison et devenir fonctionnaire.
Un jour, elle avait disparu de ma vie, soudainement.
J’avais appris, plus tard, son départ en catastrophe pour l’Amérique du Sud…j’avais espéré, pour elle, un Eldorado au Venezuela, une vie de rêve en Argentine…
Je ne l’aurais jamais imaginé dans un bordel de Guyane…tu vois, ne faut pas rêver…
Plus jeune, j’avais eu la chance de démanteler trois fumeries du côté de la Gare de Lyon, et fait fermer, du côté de La Chapelle, six « clandés » qui servaient de maison d’abattage, et dont les bénéfices profitaient à trois familles différentes du milieu Parisien. Y exerçaient des filles punies, en provenance de maisons dites « respectables » qui pratiquaient ce genre de sanctions.
Vingt passes la journée, six jours par semaine, et chaque mardi, un comptable et deux gardes du corps à l’accent Anglo-Saxon, venaient récupérer l’osier, faire les comptes, et signer le certif de « bonne gestion » confirmant qu’il n’y avait pas de fuite dans les finances.
En épluchant l’éloquente documentation d’une de ces boutiques, et en effectuant des recoupements, comme seuls savent en faire les poulets, on avait eu la surprise de trouver les noms de dix-sept fonctionnaires, tous bien notés dans leurs administrations respectives, dont les moyens financiers, sans doute limités, n’avait pas permis l’accès à des plaisirs de haut de gamme, et qui fréquentaient l’un de ces endroits abjects…
J’avais été étonné, mais pas surpris…je savais depuis longtemps que les hommes pensaient avec leur queue.
L’affaire sur laquelle je bossais ?
Un machin à part…
Un sacré truc….
Imagine-toi une sorte d’association « ludique » de hauts-fonctionnaires de la république, de riches hommes d’affaires, de dirigeants étrangers, même, participant sous de faux noms à des mélanges de genre, des pratiques plutôt curieuses, classées autrefois par la faculté, dans la catégorie des dépravations et des perversions. Au « 36 », le commissaire Daubier, un spécialiste de la jambe en l’air, m’avait dégourdi sur ce qu’on appelait les « paraphilies ». J’avais bien aimé le mot, j’avais moins aimé tout ce que recouvrait cette appellation.
Louis Daubier était un « pince-sans-rire » qui possédait une connaissance approfondie de l’argot, de l’univers des voyous, du monde des maisons-closes, et de l’âme humaine. Son épouse s’était tirée de leur pavillon de Nogent. Elle était devenue la maîtresse de Marcel Bucard, (2) un politicien, ancien séminariste, et héros de guerre, fondateur en mille-neuf-cent-trente-trois du Parti Franciste, une ligue d’extrême droite.
« Bon débarras » m’avait-il dit, un soir que nous étions allés boire un godet au « Petit Pont », le troquet de Léo Belsunce, sur la rive gauche, en face de Notre-Dame. « Quand Bucard va découvrir à quel point Henriette est chiante, il va vite la foutre dehors… »
(Carte de police authentique de l'époque pendant laquelle se déroule " Drôles de Moeurs)
Alcool aidant, Daubier et moi avions sympathisé. Il était devenu un peu mon mentor. Il m’apprenait les ficelles, les ruses, le langage, les menaces voilées, les suggestions utiles. Il m’avait également appris qu’il ne fallait jamais humilier un « vaincu ». « Cela ne sert à rien » disait-il…. « Tiens, regarde ce qui se passe en ce moment en Allemagne…ça donne à penser, tu crois pas ? »
En fait, l’enquête qui était devenue mon quotidien, avait commencé pas très loin d’un hôtel particulier de la rue de Courcelles, tout près de Saint-Philippe du Roule. Deux hirondelles à vélo avaient trouvé, coincé entre le châssis d’une limousine, type C.4, de marque Citroën, et le granit du bord de trottoir, un homme d’une cinquantaine d’année, vêtu comme un milord, dont le corps portait les nombreuses traces d’un dessoudage en règle. Pour s’assurer que l’homme serait définitivement muet, on avait utilisé le pétard autant que la lame. Les agresseurs ? Combien étaient-ils ? Pour massacrer un type comme ça, il fallait au moins être trois, ou bien avoir de l’ordre, de la méthode, et le cœur bien accroché. Quand on coupe une carotide à plusieurs endroits, ça gicle pas mal… !
Le plus ancien des deux fonctionnaires avait cavalé jusqu’à un avertisseur, une de ces bornes noires et blanches reliées au poste de police le plus proche. Neuf minutes plus tard, des fonctionnaires en civil du commissariat principal du huitième arrondissement étaient arrivés sur place. Il avait ensuite suffi d’un coup de téléphone au bon endroit, et de trois quart d’heures de patience pour que les flics de la brigade mondaine se penchent, à leur tour, sur le corps.
Le dieu des poulets, c’est la chance… !
Du beau linge, je te dis…
Au dos de la seule carte de visite, pas encore totalement souillée par le sang, d’ailleurs déjà figé, qui avait été trouvée par le médecin légiste, lors de la découverte du corps dans le caniveau, une adresse avait été crayonnée ainsi qu’un numéro de téléphone, BAL 13 22. Ces deux informations critiques avaient été un bon point de départ pour le travail de fourmis des poulets de la « Mondaine ».
De fil en aiguille, l’enquête avait avancé, puis ralenti, on avait surveillé des personnages douteux, bâti des hypothèses, conçu des scenarii, évoqué des influences, supposé des complicités, avec si peu de bonne volonté et de motivation, que la presse en avait fait ses choux gras…Alors, du coup, le gouvernement avait pris peur. Il y avait eu des perquisitions dans des quartiers divers, mais où seuls de riches bourgeois pouvaient se loger. Des documents avaient été saisis, certains concernaient des reconnaissances de dettes, d’autres confirmaient des transferts de fonds, du papier à en-tête, vierge, de la Présidence avait été découvert dans le double fond d’un secrétaire.
On avait trouvé également d’étranges carnets, sur la couverture desquels figurait un petit logo stylisé, représentant une sorte de déesse, visiblement d’inspiration égyptienne accompagnée des hiéroglyphes qui pouvaient être vocalisés comme signifiant « Hatyr ». Il y avait eu également la découverte d’un paquet de bulletins d’inscription, certains vierges, certains déjà remplis et signés, et concernant l’adhésion à une certaine association des « Amis d’Hator » dont le siège se trouvait à Paris, sans aucune autre précision.
Je te le dis : Saint-Martin, patron des flics, nous avait filé un sacré coup de main…
Les pages des carnets comportaient des noms de personnes en vue, majoritairement des hommes, bien que quelques femmes apparaissent çà et là. En regard de ces noms, figuraient, facilement compréhensible, les préférences et les appétits de cette « élite Parisienne » ainsi que les noms, et numéro de téléphone des personnes, femmes ou hommes, capable de satisfaire les désirs les plus secrets, les envies les plus inavouables. Sur la troisième page de couverture de l’un de ces carnets, avait été agrafée une sorte de tarif des prestations, qui ne laissait aucun doute sur la nature de l’association des « Amis d’Hator ». Les fameux amis devaient d’ailleurs avoir les poches cousues d’or, sachant que la prestation de base représentait l’équivalent d’un mois de salaire d’un métallo en région parisienne. Pour ceux qui en voulait un peu plus, on dépassait légèrement, à l’unité, le salaire mensuel d’un professeur de faculté.
La documentation récupérée avait atterri aux « scellés ». Le dessin de la petite déesse avait intrigué le patron. Il avait demandé à l’archiviste en chef, Verdoux, de venir jeter un œil. Il connaissait sa passion pour l’Egyptologie…L’homme qui présidait au destin des paperasses en conserve, nous avait rencardé là-dessus en précisant : « votre dessin, on dirait Hator… ! C’était la déesse des festivités et de l'amour. Dans ce rôle, elle était vénérée à Dendérah et associée au dieu Horus, dans la ville d'Edfou. Elle était représentée sous les traits d'une vache, ou d'une femme portant le disque solaire entre ses cornes ».
Le commissaire Daubier en était resté comme deux ronds de flan. Il avait simplement dit à l’archiviste : « Mon p’tit Verdoux, c’est pas chez les flics que vous devriez être, c’est au musée du Louvre… » L’archiviste avait rosi…
L’enquête avait pris un autre tour…on était vraiment, maintenant, en plein cœur de notre métier…Daubier m’avait pris à part, comme il aimait à le faire, et avec un sourire malicieux, avait annoncé : « On dirait un cercle d’amis…des gens qui partagent pas mal de trucs…Qu’en dites-vous Samuel ? vous allez creuser tout-ça un peu plus, non ? » En quarante-huit heures, l’enquête avait encore une fois changé de rythme. Les flics de la brigade y allaient « à marche forcée » … Les éléments de l’enquête, déjà disponibles, étaient tellement sensibles que seulement une dizaine de personnes au plus, siégeant à des postes-clé de la République, avaient eu finalement accès à des informations alarmantes sur l’existence de « pratiques particulières » auxquelles se livraient certains hauts-fonctionnaires, ministres, chefs de cabinets. Il aurait suffi que circulent, tout ou partie de certaines photos découvertes lors d’une des nombreuses perquisitions conduites, pour qu’il en soit fini de la Troisième République. En cette année mille-neuf-cent-trente-cinq, c’était un risque que personne ne voulait prendre, surtout pas Camille C, Eugène P, et d’autres personnes qui avaient leur bureau à l’Assemblée Nationale, au Palais du Luxembourg, place Beauvau ou dans d’autres bâtiments de la République.
Vu l’ampleur du truc, les flics du huitième arrondissement s’étaient vite sentis inutiles. Il n’était pas question d’aller leur demander de l’aide pour les filoches, les descentes, s’il y en avait besoin. On allait devoir se démerder comme on pouvait. Chez les flics, comme chez les truands, il y avait des surnoms. Dans mon équipe, j’avais même un ancien voyou reconverti poulet, confirmant ainsi que la limite était vraiment bien ténue entre les deux professions. L’homme, Pierre Béjeu, surnommé « Pinces d’Or » était spécialiste en serrures, un talent qui semblait naturel, et, pour moi, bien utile. J’avais un autre préféré, que l’équipe avait surnommé « la baron », rapport à son incroyable capacité à s’enfiler plusieurs fois de suite, cinquante centilitres de bière, quand ses collègues se contentaient d’un simple bock de vingt-cinq. Le Baron maitrisait avec brio et intelligence les techniques les plus perfides pour faire parler les gens, dans la rue, dans un troquet, un autobus, un métro. Les deux étaient devenus, le temps de l’enquête, mes plus proches collaborateurs.
Bien évidemment, s’il se fut agi de quidam « lambda », l’affaire n’aurait sans doute pas dépassé les placards poussiéreux du « 36 », mais il s’agissait de beau linge, alors, bien sûr tout se déroulait en liaison avec l’Elysée, le chef de cabinet du Président Lebrun, et celui du cabinet du Premier Ministre.
On était bombardé de coups de fil entre cinq et sept fois par jour…. Le patron venait me voir trop souvent, se malaxant les doigts, ce qui était, chez lui, un signe certain de grande anxiété :
« Alors Levkovitch, ça avance vos histoires de cul ? ». Il devenait invivable, alternant les engueulades avec les promesses de promotion en cas de succès… « Demerdez vous pour savoir qui baise qui, comment, et pourquoi. Je veux des détails, des preuves, des noms. Je veux des témoignages, des photos, des adresses… j’ai le préfet deux fois par jour. Au boulot mon petit Lev. Vous rêvasserez un autre jour… »
Tout ça, c’était un peu gros pour moi, Samuel Levkovitch, flic moyen, grand pêcheur devant l’éternel, avec bords de Marne à Nogent, blanc au fil de l’eau, et java dans les oreilles, près de « Chez Gégène », « Fernand », ou des « Marronniers », là où, il y a bien longtemps, j’avais emballé Lola, qui avait dix-sept ans, alors que j’en avais tout juste seize. Si j’avais été une fine lame de temps en temps, je m’étais bien rangé des voitures, maintenant que la cinquantaine venait de passer, un jour de juin récent…
Oui, c’était même trop gros pour moi, tout-ça, mais à force de poireauter, de suivre des faux innocents dans les bus, les métros, à pied dans les beaux quartiers, de secouer quelques indics spécialisés dans les affaires de mœurs, les transferts de prostituées d’un endroit à un autre, suivant les demandes en « talents spécifiques », on avait fini par trouver un point commun, un lieu de rencontre, pas très loin du Parc Monceau, un magnifique hôtel particulier de la rue Henri Rochefort, un truc calme, qui devait coûter une fortune. On avait planqué trois semaines, filoché jusque dans le parc voisin, graissé la patte à deux fleuristes, trois jardiniers, et surtout, un soir, on avait vu arriver Paul Etienne F. haut fonctionnaire avec rang de ministre dans le gouvernement, en compagnie d’un souteneur, Antoine Moretti, plus connu sous le nom de Tony-Pieds-Plats. Tony était un julot monté de Marseille. Il s’était fait viré comme un malpropre pour avoir essayé de doubler François Spirito et Paul Carbone dans une affaire de trafic de cigarettes. Le lendemain de son départ pour Paris, son restaurant du Panier, « Le Petit Pigalle », avait été ravagé par un incendie qui ne laissait aucun doute sur ses auteurs du délit comme sur les causes profondes du sinistre.
Pas de témoins, pas d’assurance, vingt ans de « travail » étaient partis en fumée…Il ne fallait pas rigoler avec les caïds. Moretti s’était reconverti dans la galanterie de haut niveau, fournissant de jeunes éphèbes à des veuves riches mais délaissées, et de fraîches beautés peu farouches à des barbons en quête de pratiques sexuelles « non-conventionnelles » …Ce mot, figurant sur le rapport préliminaire que je venais de remettre au commissaire principal Antoine Thérond, avait bien fait rire mon supérieur…. « C’est quoi, non-conventionnel ? Vous voulez-dire quoi, en fait ? »
J’avais, soudainement eu honte de mes découvertes, des résultats de cette longue investigations.
Alors, je lui avais expliqué les différents moments clés de l’enquête, la rencontre « de hasard », montée, en fait avec finesse, et de toutes pièces, dans un bistrot de la rue de Courcelles, avec une cuisinière qui officiait dans l’hôtel particulier de la rue Henri Rochefort, une ancienne prostituée reconvertie dans la cuisine bourgeoise. La rencontre s’était terminée quai des Orfèvres. Mes collègues avaient bien travaillé. Il avait suffi de quelques mots bien placés, de quelques souvenirs douloureux rappelés à la cuisinière, de quelques promesses de tracas administratifs, pour qu’elle se mette à table, un comble pour une personne qui préparait de somptueux repas pour une « élite » qui avait les moyens. Marguerite Billaud, une ancienne sous-maîtresse du « Sphynx » avait parlé tellement vite qu’il avait fallu faire venir une sténotypiste avec son sténotype Grandjean, pour noter la foule de détails avant que Marguerite ne perde la mémoire.
Le numéro de téléphone BAL 13.22 avait conduit l’équipe à une petite agence de placement de gens de maison située dans la tranquille rue Roussel, dans le quartier de la Plaine-Monceaux. On y avait débarqué en bon nombre, pour éplucher les registres. Le « Baron », qui en dehors d’être soiffard, était un excellent flic, un de ces types qui n’aurait pas pu faire un métier différent, avait été surpris de retrouver dans le fichier de l’agence, des noms qui lui chatouillaient sa mémoire de poulet : Mauricette Girod, une tapineuse née à Dôle, dans le Jura, Louise Verhofstadt, une professionnelle de la galanterie qui avait émigré de Belgique et s’était installée à son compte du côté de la Gare St Lazare, Emilie Carlier, dont le père, mineur, avait péri lors d’un coup de grisou dans sa fosse, laissant derrière lui une veuve et sept enfants, toutes des filles. Les flics avaient trouvé en tout quarante-trois noms de femmes, et curieusement, dans le registre des intendants, valets de pieds, majordome, chauffeurs de maître, les blazes de « trente-neuf majeurs, défavorablement connus » figuraient. Du personnel certainement formé à satisfaire les moindres désirs de ces messieurs-dames de la rue Henri Rochefort ?
Ce qui avait intrigué les enquêteurs était que dans d’autre registres, découverts sagement planqués sous des lames du parquet en chêne de Hongrie, les patronymes, des femmes comme des hommes, étaient inscrits au crayon de couleur, alors que les prénoms l’étaient à l’encre bleu outremer. Les registres de l’agence ? de vrais arcs-en-ciel. Il y avait du violet, de l’indigo, du bleu. Certains noms étaient inscrits en vert, d’autres encore en jaune. Pour l’orange, on ne dépassait pas la dizaine, dans chaque registre. La couleur qui dominait le tout était le rouge….
Ces noms ne correspondaient pas à du « personnel de maison ». Les flics s’étaient gratté la tête quelques instants, jusqu’à ce que Jean-Paul Thénard, qui avait fait toute sa carrière à « La Mondaine » à la suite de son vieux qui l’avait dirigé pendant vingt-sept ans, assène, de sa voix de baryton : « Faut par trop chercher, les petits, c’est tout simplement une liste de clients… »
L’enquête avançait bien.
A la mondaine, on continuait à se creuser les méninges
A l’Elysée, on essayait de mettre en place un gouvernement qui puisse fonctionner…
Le premier juin mille-neuf-cent-trente-cinq, le gouvernement Fernand Bouisson, voyait le jour. Le sept juin, ce même gouvernement était dissous.
Le huit juin, Pierre Laval, nouveau Président du conseil, appela au téléphone Joseph Paganon, son ministre de l’intérieur : « Alors, monsieur le Ministre, où en êtes-vous avec cette histoire de mœurs » demanda-t-il. « Avez-vous au moins progressé ? »
La voix à l’accent rocailleux de son auvergne natale, avait trahi la plus grande impatience, le désir impératif d’une résolution rapide de cette triste et préoccupante affaire de fesses. Il y allait de la réputation du gouvernement. Lui, Pierre Laval, allait nettoyer tout ça….
Comme souvent, dans les enquêtes, il existe des concours de circonstances qui viennent à l’aide des flic désespérés. Verdoux, l’archiviste, avait débarqué dans le bureau, tenant à la main un des registres prélevés lors de la descente à l’agence de placement de la rue Roussel…. « Vos noms avec les couleurs, ça m’a fait penser à un truc que m’avait raconté ma femme, dieu ait son âme. Elle travaillait au théâtre de l’Athénée. Quand il est arrivé au théâtre, en trente-quatre, Louis Jouvet avait demandé qu’on mette en place un système de fiches permettant de trouver rapidement quel genre de comédienne ou de comédien pouvait être sollicité pour jouer tel ou tel rôle. Huguette avait proposé des fiches de couleurs différentes, pour ne pas perdre du temps lors des recherches, je me souviens que par exemple, pour des tragédies grecques, c’était le vert, pour de l’opérette, du bleu, pour de la comédie, on utilisait le jaune…et si votre histoire de couleurs, c’était une sorte de code ? un truc pour différencier les gens, les mettre dans des catégories ?
Le patron m’avait fait venir dans son bureau qui donnait sur le quai des Orfèvres. De l’autre côté de la Seine, on pouvait voir les immeubles bourgeois, regarder le trafic, apercevoir même, en se penchant un peu, une partie de la coupole de l’Académie Française. Ce jour-là, j’aurais bien donné dix ans de ma vie pour ne pas devoir rentrer dans le détail…Mais j’étais flic…… !
« Faites-moi donc un point, Samuel…J’ai rendez-vous à quatorze-heures à Beauvau » … J’avais préparé un épais dossier, dactylographié, auquel j’avais joint une synthèse des enquêtes effectuées, un truc simple à comprendre. Avant le mardi vingt-six mars, il n’y avait que des soupçons, des rumeurs, des bribes d’idées, des allusions, qui circulaient chez les indics, des trucs auxquels personne ne prêtait vraiment attention. Après la découverte du cadavre à Saint-Philippe du Roule, tout avait changé. Vingt-huit gardes à vue, soixante-dix- sept perquisitions, dix-neuf arrestations en rapport avec des crimes et des délits qui relevaient de la compétence de la mondaine. Il y avait soixante- quinze classeurs, quarante caisses de « documents annexes », neuf-cent photos jugées « compromettantes » et « pouvant donner lieu à des manipulations ou/et du chantage ». L’enquête avait nécessité la collaboration de vingt-trois policiers. Il y avait mille-deux-cent-vingt-et-une-pages de procès-verbaux. Il y avait surtout, sur une page à part, dans le dossier préparé pour le patron, le fameux code des couleurs, une surprise qui m’avait laissé perplexe, quand l’équipe qui s’était chargée des interrogatoires, avait finalement mis en place la synthèse.
Pour lui faciliter la rencontre à Beauvau, j’avais commencé à expliquer au patron, pendant qu’il prenait des notes.
« L’association des Amis d’Hator ? Un truc de galanterie, patron, mais ça, vous l’aviez compris, non ? Il y a une mise de fond au début, une sorte de droit d’entrée. Les clients qui fréquentent l’endroit sont à la recherche de sensations fortes. Autrefois, ils auraient été qualifiés de « pervers », maintenant, on les appelle des « adeptes de paraphilies », question de mœurs, question de temps. Le droit d’entrée est à cinquante mille francs pour la première année, trente-cinq mille pour les quatre années suivantes. Une montagne de fric qui circule, et dont on ne se sait pas exactement à quoi il sert. Payer les « prestataires de services, le fameux personnel de maison, femmes ou hommes, mais pas seulement. On va continuer à chercher où va le fric. Pour la clientèle, que du beau linge…ça fait réfléchir, c’est une affaire qui nous dépasse tout, je crois… »
Il avait bien fallu rentrer plus avant dans les détails scabreux. Les clients « violets » ? Deux cent hommes, vingt et une femmes. Il y avait dans cette catégorie neuf hauts-fonctionnaires de l’Intérieur, trois du quai d’Orsay, deux chefs de cabinet du ministère des finances. Ces membres de l’association, qui fréquentaient assidument la rue Henri Rochefort pratiquaient tous l’Algolagnie (A). Dans la catégorie « indigo », en dehors des soixante-dix-huit industriels, il y avait treize politiciens de la majorité, onze de l’opposition, trois anciens séminaristes, un directeur du service Municipal des Pompes Funèbres de Paris, dix-sept maires de communes de la petite-couronne de Paris, un fabricant de piano dont les instruments étaient utilisés de Paris à Buenos-Aires, trois propriétaires de restaurants étoilés, deux préfets de départements situés au sud de la Loire. Nous avions également établi une liste concernant ces demoiselles et dames, qui venaient seules ou en compagnie, pour sacrifier à une pratique partagée avec les hommes dans la catégorie « indigo », l’Apodysophilie (B). Chez les « bleus », hommes et femmes, nous avions pu établir qu’au moins vingt-sept sénateurs venaient, régulièrement, aux soirées des Amis d’Hator, avec ou sans accompagnants. Quant aux clients « lambdas », adeptes du Candaulisme (C), ils représentaient plus de cent cinquante personnes, dont certains qui étaient membres de l’association depuis mille-neuf-cent-vingt-sept, juste un an après sa création.
Le patron s’était soudainement écrié :
« Ralentissez, Lev, je n’arrive plus à vous suivre…vous allez trop vite…En plus, il faut que je comprenne bien de quoi vous parlez, vous êtes sûr de votre coup, hein ? »
Il avait sorti une cigarette de son paquet, l’avait allumé et aspiré goulument la première bouffée. Il s’était soudainement calmé.
Si j’étais sûr ? Oui, J’étais sûr…J’avais alors continué plus doucement….
« Catégorie verte, patron, la couleur de l’espérance » …
J’avais repris l’étrange énumération avec une envie de rire que je savais être complètement déplacée. «
Des Chronophiles, (D) patron… ! » Des baronnes du seizième qui venaient se faire reluire entre les bras de très jeunes « amants », il y en avait à la pelle, des hommes, intellos sur le retour, qui vivaient à Saint Germain des Près, c’était aussi plusieurs dizaines, à la recherche de très jeunes demoiselles, souvent, même trop jeunes. Dans la catégorie « verte », nous avions même découvert de riches actionnaires de la compagnie du chemin de fer du Paris-Orléans et le président d’une compagnie aérienne Espagnole fondée en mille-neuf-cent-vingt-sept, qui aimait passer un soir à l’association, quand il était à Paris pour négocier des accords commerciaux avec Air Orient.
« La grande différence d’âge, patron, ça plait à certains », avais-je ajouté, en espérant travestir quelque peu le grotesque de la situation, l’étrangeté du moment…
Soixante-huit clients, et neuf clientes constituaient, ensuite, la « petite » catégorie des « jaunes », ceux qui se connaissaient sous le nom savant de « Clysterophiles » (E). Parmi les hommes, nous avions recensé quatre banquiers qui avaient pignon sur rue, et deux professeurs de faculté.
Rue Henri Rochefort, lors de la perquisition des caves, qui représentaient plus de quatre cent mètres carrés en sous-sol, tout un matériel de stérilisation des « instruments » digne d’un grand hôpital, avait été découvert et répertorié par les fonctionnaires. Deux autoclaves à vapeur figuraient dans l’inventaire, dont un qui avait servi dans une clinique de province.
C’était la catégorie « orange » qui nous avait donné le plus à réfléchir. Les noms de quatre cent vingt-cinq hommes avaient été classés alphabétiquement. Les professions libérales étaient largement représentées, mais les fonctionnaires de l’état suivaient de près : quatre-vingt-sept juges, huit procureurs, un ancien préfet de Police déplacé dans ministère en récompense de sa longévité à la tête de la Grande Maison. Trente-neuf officiers de la Marine Nationale, figuraient également dans cette catégorie ». Des ligueurs d’extrême droite s’étaient aussi glissés parmi les habitués de l’association des Amis d’Hator, et figuraient également dans la catégorie orange, les Masochistes (F)
En Octobre trente-cinq, sept mois après le début de l’affaire, nous n’avions pas encore enquêté sur les huit-cent-cinquante individus dont les noms étaient inscrits en rouge dans les registres de la rue Roussel. Il avait fallu mettre les bouchées double. Le patron voulait en finir avant Noël.
Après enquêtes approfondies, témoignages de voisins malveillants, d’anciennes maîtresses ou d’amants poussiéreux, nous avions toujours du mal à caser ces « clients » dans une seule et même catégorie.
C’était des interrogatoires complémentaires avec des tapins de l’avenue de Wagram qui nous avait éclairé. En fait, dans la catégorie « rouge » (G) se retrouvaient ceux qui n’entraient pas dans les autres couleurs de l’arc en ciel, tout simplement… Il y avait donc toute une clientèle pratiquant des « conduites sexuelles non-conventionnelles » allant, entre autres, de l’ondinisme au voyeurisme, en passant par la fugiophilie, le fétichisme, la narratophilie ou la maïeusophilie.
Le patron était anxieux. Cela se voyait au nombre de cigarettes qu’il fumait par heure. La convocation était arrivée quelques jours auparavant. C’est une procédure habituelle
« Le cabinet du Juge Matthieu, c’est par où ? » avait -il demandé à l’huissier qui se trouvait en pas du grand escalier. Il consulta l’annuaire du palais de justice de Paris, un vaste bâtiment situé juste derrière le « 36 ».
« Matthieu, bureau 321, troisième étage, vous prenez à droite en arrivant sur le palier, vous arriverez dans un cul-de-sac, c’est là. »…
Le mardi quatorze janvier mille-neuf-cent-trente-six, un rendez-vous avait été effectivement organisé, dans le cabinet de François Matthieu, le juge d’instruction désigné pour débrouiller l’écheveau complexe de ce que la presse et le grand public appelait, avec un sourire plein de malice, l’affaire du « Parc Monceau », un clin d’œil géographique à la proximité du jardin Parisien avec l’hôtel particulier de la rue Henri Rochefort. Le juge avait fait apporter des chaises supplémentaires. Je me souviens bien. J’étais venu avec le patron, qui m’avait demandé de faire un exposé concis. Il y avait Léon Bérard, le ministre de la Justice de Pierre Laval, Georges Bonnet, ministre de l’Industrie, Georges Mandel, le ministre des Postes, Télégraphes et Téléphones et Joseph Paganon, Ministre de l’Intérieur, accompagné de Roger Langeron, le préfet de Police. Je pense que l’idée était surtout de voir de quels moyens « techniques » nous pouvions avoir besoin, et surtout, de quoi nous pouvions disposer, pour essayer de boucler ce dossier au plus vite en éclairant la justice. Tout le monde savait que plusieurs dizaines de hauts-fonctionnaires avaient été mis en examen, non pas concernant directement leurs turpitudes, mais plutôt la façon de financer les parties fines de la rue Henri Rochefort. Les limiers spécialisés dans ce genre d’affaires avaient passé quatre mois et demi à retracer des mouvements de fonds suspects. Même les hauts-fonctionnaires les mieux payés n’auraient pas pu fréquenter l’association des « Amis d’Hator » sans avoir, quelque part, des compléments de revenus qui n’avaient pas été nécessairement déclarés au fisc. Ils avaient découvert qu’un vaste réseau de trafic d’influences, et de passe-droits payants, avait permis à certains de préparer leurs vieux jours, tout en profitant allègrement de « ces jours-ci », ce qui, au tarif des prestations des « Amis d’Hator » représentait de véritables petites fortunes.
Un politicien qui se nommait Louis Marin avait été désigné pour représenter le chef du gouvernement. Il s’était levé cérémonieusement et, sur un ton grave, avait annoncé : « j’ai des instructions de Pierre Laval. Il veut que les choses aillent vite. Vous avez trois mois. Le gouvernement vous charge de nettoyer cette merde. Vous aurez le procureur qui va avec…mais on veut des résultats, vite. Il y a trop de fonctionnaires qui n’ont pas la queue propre, pour parler vulgairement. » Bon, on était entre hommes, même si le franc-parler du fonctionnaire en question tranchait un peu sur la façon habituelle de s’exprimer, des hauts-fonctionnaires de la république, plutôt enclins à utiliser des images et faire des allusions, qu’à « trancher dans le vif » On va dépayser le volet « justice » à Versailles. C’est plus loin pour les journalistes. On nous fera peut-être un peu moins chier… » Le juge avait baissé les yeux, le patron n’en menait pas large. La réunion avait duré trois heures.
Le palais de justice était trop chauffé.
On avait soif, alors en sortant, nous avions fait un crochet par « Le Petit Pont », le troquet de Léo Belsunce, là où nous nous protégions des cons et des fâcheux.
« Mon p’tit Levkovitch, ça va être long et douloureux. Alors on va déjà commencer par boire un coup, et ensuite on discutera sagement de comment on va, de notre côté, préparer le volet judiciaire de cette affaire à rallonge. Déjà, le 27 janvier, on préparera tous les dossiers pour les envoyer au palais à Versailles. Il y a assez de documentation et de scellés, pour remplir deux camions Vous vous chargerez de çà, Levkovitch »
J’avais acquiescé, content de pouvoir donner un coup de main au patron.
Mercredi vingt-deux janvier, jour de la Saint Vincent, le gouvernement de Pierre Laval était dissous. Le 24 janvier, celui d’Albert Sarraut était mis en place.
Samedi 25 janvier, alors que j’étais de permanence à la Mondaine pour la totalité du week-end, j’avais accepté un déjeuner dans une brasserie de la rive gauche. Je m’étais donné trois heures pour décompresser, content de pouvoir évoquer un passé qui me tenait à cœur, avec un ancien collègue qui avait quitté la maison, et dirigeait maintenant une célèbre agence de détectives privés, une boite spécialisée dans les « filatures et preuves pour affaire privées et commerciales », un truc pour traquer les maîtresses et les amants, et faciliter le travail des avocats dans les affaires de divorce, les captations de clientèles, les escroqueries en tout genre, les usurpations d’identité, les appropriations de brevets.
A midi-vingt, j’avais quitté le « 36 », traversé la Seine, et m’étais engagé dans les petites rues de Saint-André-Des-Arts, en route vers le « Procope », rue de l’Ancienne Comédie. A treize-heures-quinze, deux camions bâchés « Berliet » type GD, portant l’inscription connue des « Transports Automobiles Municipaux » s’étaient présentés devant le « 36 », encadrés par six gendarmes motocyclistes. Deux tractions avant onze chevaux, accompagnaient l’étrange convoi. Huit hommes en civil en étaient descendus.
Les quatre plantons qui gardaient l’entrée du bâtiment avaient été impressionnés, surpris, même, mais Ils n’avaient pas posé de questions aux hommes en imperméables et chapeau mou, qui, visiblement, devaient bien connaitre la maison. Il devait s’agir d’une de ces missions mise en place par des gens importants, comme souvent. Moins on en savait, mieux c’était.
Celui qui semblait le plus âgé avait sorti de la poche de son veston un ordre de mission à l’en-tête du ministère de l’Intérieur, signé par le Ministre lui-même et le préfet de police en exercice. Il avait expliqué, avec un accent du sud-est dans la voix, que l’ordre de mission autorisait le transfert de certains dossiers et scellés, depuis les bureaux du «36 » jusqu’ au palais de justice de Versailles, où ils seraient mis en sûreté. Jointe à l’ordre de mission, une liste sur trois pages, détaillait les numéros d’enregistrement des différents classeurs, caisses, cartons, malles et valises, qui devaient être chargés dans les véhicules. « Du travail minutieux » avait remarqué le planton en chef. Il avait donné, bien sûr, son accord, et même proposé un coup de main et le prêt de deux plantons. L’homme en civil avait parlé quelques instants à voix basse avec deux de ses collègues qui s’étaient éloignés vers les camions, puis en étaient revenus accompagnés de sept costauds, en salopette, des gars bâtis comme des déménageurs.
« Amenez-nous aux archives et montrez-nous simplement ou se trouve ce qu’on doit prendre. On fera le contrôle à partir des listes que nous avons, et on chargera les camions nous-mêmes. C’est samedi, profitez de ça pour soufflez un peu et retourner à votre belote. »
Sur une table, dans la petite pièce d’accueil du 36, un jeu de carte était étalé, des verres avaient été à moitié vidés, une odeur d’anis flottait, mélangée à des remugles de transpiration. En quarante cinq minutes, les deux camions Berliet avaient été chargés. A quatorze heures trente, une fois les camions chargés, les gendarmes de l’escorte étaient remontés sur leurs motos TERROT 500 RL, les « policiers en civil » avaient rejoint leurs véhicules, et le convoi s’était remis en route en direction de l’Hôtel de Ville. Des témoins racontèrent par la suite avoir vu le convoi traverser la Seine, remonter la rue Saint Jacques, et filer vers le sud en passant par la porte d’Orléans.
Dimanche 26 janvier, en milieu de matinée, des chiens de chasse participant à une battue dans une forêt privée de la région de Rambouillet, suivirent une piste qui n’était pas celle d’un quelconque gibier. Dans une clairière, les chasseurs découvrirent les restes encore chauds de deux camions Berliet, deux véhicules Citroën et six squelettes métalliques de motos de moyenne cylindrée. Derrière un chêne, un tas de vêtements, également détruits par les flammes, donnait une petite idée du nombre de personnes qui avaient dû changer de route à cet endroit précis. Les chasseurs n’avait pas compris pourquoi une partie des restes d’uniformes faisaient penser à ceux que portaient les gendarmes à moto. Des inspecteurs de police de Versailles et du Quai des Orfèvres avaient été dépêchés sur place, et avait commencé leurs investigations en début d’après-midi.
En dépit des moins-cinq qu’affichaient les thermomètres, et de l’humidité qui régnait dans la clairière d’Angervilliers, où se pressaient, maintenant, plus de cinquante journalistes Français comme étrangers, on s’était activé tout l’après-midi. A dix-neuf heures trente, alors que les autorités s’apprêtaient à quitter les lieux, tout en y laissant une compagnie de Gardes Mobiles pour protéger les décombres jusqu’au lendemain, un enquêteur du commissariat de Versailles, eu l’attention attirée par une sorte de portefeuille en cuir qui n’était pas entièrement consumé. Sur un des coins du portefeuille, il y avait une sorte d’emblème, une espèce de roue dentée avec une hache et un épi de blé.(3)
A l’intérieur, visiblement protégée, bien que partiellement, des flammes, l’enquêteur avait trouvé ce qui ressemblait fort a une lettre manuscrite, qui était encore partiellement lisible : il avait réussi à déchiffrer quelques mots à la suite, qui devaient faire partie de la dernière phrase : ….en sorte que les procès n’aient jamais lieu…..donc de…..les dispositions nécess…..approprier les documents en ques…….qui pourr…..utiles dans le f……Vous me tiendrez pers……..ant et utili………les moy…….qui vous semb…..nec………votre mi…….
La personne qui avait écrit ce mot avait signé des initiales M.B.
Il était certain que ce soir-là, des tas de hauts-fonctionnaires allaient avoir du mal à s’endormir.
La véritable affaire du "Parc Monceau" venait de commencer.
© 2019 Sylvain Ubersfeld pour Histoires d’U
Ancêtre de la RATP. Supprimée en 1948 et remplacée par la Régie Autonome des Transports Parisiens.
Fondateur du Parti Franciste qui fut collaborationniste durant la deuxième guerre mondiale. Fusillé le 13 mars 1946 au Fort de Châtillon.
Emblème utilisé par le parti Franciste.
A. érotisation de la douleur. Phénomène observé dans certaines déviations des conduites sexuelles utilisant la douleur subie (masochisme) ou provoquée sur autrui (sadisme) comme moyen d'obtention du plaisir sexuel.
B. Apodysophilie : déviation sexuelle consistant à s'exposer nu en public.
C. Candaulisme : pratique sexuelle dans laquelle l'homme ressent une excitation sexuelle en exposant ou partageant sa compagne avec d'autres hommes.
D. La chronophilie (du grec ancien χρόνος / khrónos (« temps ») et φιλία / philía (« amour »)) est un terme utilisé par John Money pour désigner l'attirance sexuelle d'un individu pour des personnes présentant un âge particulier.
Le fantasme est à double sens. Un(e) jeune qui ressent de l'attirance pour une personne âgée est chronophile (plus précisément gérontophile), de la même façon qu'une personne âgée qui ressent de l'attirance pour un individu de loin plus jeune qu'elle est chronophile (plus précisément pédophile ou hébéphile).
E. Clystérophilie : pratique sexuelle consistant à se faire couler un liquide dans l'anus, ou à appliquer cette pratique à un partenaire.
F. Masochisme : Le masochisme est la recherche d'un plaisir dans la douleur. À l'origine, cette recherche est liée à des pratiques à caractère sexuel. Par extension, les conduites masochistes sont le fait de personnes qui recherchent la souffrance et l'humiliation, et/ou qui s'y complaisent1.Le terme « masochisme », forgé par le psychiatre Krafft-Ebing, dérive du nom de l'écrivain allemand Leopold von Sacher-Masoch.
G . Paraphilies citées dans cette histoire dans la catégorie "G"
G.1 Ondinisme : tendance érotique dans laquelle le plaisir est provoqué par la vue ou le contact de l'eau ou de l'urine.
G.2 Voyeurisme : Le voyeurisme consiste à regarder, en se tenant caché, certaines scènes, parfois érotiques.
G.3 Fugiophilie : Attirance pour les choses glissantes/gluantes.
G.4 Fétichisme : le fétichisme sexuel est une excitation sexuelle provoquée par la présence d'un objet (gant, collant...), par une partie du corps (pieds, nombril...) par une matière (latex, cuir...) ou par une situation. Ces éléments ne sont normalement pas érotiquement significatifs.
G.5 Narratophilie : déviation sexuelle dans laquelle le plaisir vient du fait de raconter des histoires obscènes ou salaces durant l'acte sexuel.
G.6 Maïeusophilie : attirance, préférence sexuelle pour les femmes enceintes. Cet attrait peut être lié aux relations sexuelles, à la lactation ou aux différentes étapes de la fécondité (la naissance du nouveau-né par exemple).