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LES SEPT RESTANT

Il en restait sept ! les autres s'étaient tous déjà tirés.Chacun des soixante dix-sept envoyés spéciaux avait sa conception du journalisme et chacun ne voyait en l'autre qu'un pisse copie drogué à l'encre d'imprimerie plutôt qu'aux idées généreuses de la république. Les sept avaient prévenu leur entourage que la journée et la nuit risquaient de durer, qu'on serait au delà de ce qu'on avait déjà connu puisqu'une armée d'acier avait déferlé sur le France, que dans peu de temps il y aurait certainement un exode, et qu'après l'exode commencerait une occupation qui ne faisait aucun doute. Ces sept là étaient entré au journal la même année et avaient en commun une seule chose : l'amour de leur métier.Puisqu'ils appartenaient au même journal, il était normal qu'ils puisse former une solide équipe et mettre leurs différences de côté, le temps d'un numéro, pour la durée d'une semaine, ou éventuellement celle d'un mois, quand la politique était calme...

Depuis le 10 mai et l'attaque de la Hollande, de la Belgique et du Luxembourg par les troupes Allemandes, les choses étaient en train de changer au journal. De vieilles rancunes remontaient à la surface, des règlements de compte prenaient régulièrement place à coup d'entrefilets en deuxième page, sans parler des lettres, déjà anonymes, commodément envoyées au rédacteur-en-chef qui était déjà suspecté de complaisance envers les militaires en uniformes vert de gris. Parmi les hommes du journal, il y avait des partisans de la SFIO, des frontistes, des républicains socialistes, et des suiveurs d'un certain Jacques Doriot. Il y avait également trois juifs dont deux étaient soupçonnés d'être en plus Franc-Maçons. Il y avait même un Tchavo Reinhart qui jouait de la guitare dans un bar de Saint-Germain quand il n'était pas en train de composer son article sur une veille machine à écrire "Royal" pour laquelle on ne trouvait plus de pièces de rechange.

Le 10 juin, en apprenant la fuite des politiciens qui se repliaient vers le Sud-Ouest, ayant déjà compris que les carottes étaient cuites, les sept restant avaient fait un curieux serment, celui de mettre de côté leurs différences et de rester unis pour la durée d'un conflit dont on ne savait pas encore combien de temps il allait durer. Ils avaient alors pris comme surnom les jours de la semaine. Des rumeurs s'étaient mises à courir dans toutes les rédactions quant à la création d'une sorte d'organisme centralisateur de l'information, une censure à la botte des Allemands, la voix de son Maître Adolf...Tchavo, qui était le plus rebelle des sept, avait dit qu'il préférait mourir plutôt que de se soumettre à une quelconque censure...Edouard Berger, le royaliste avait dit " sans la liberté de blâmer, il n'est pas d'éloge flatteur". Philippe Léger-Lefort, le rédac-chef voyait l'avenir tout en noir. "Les Boches seront sur notre dos en permanence"...Le futur allait malheureusement lui donner raison.....!


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