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SNIPERS

Dinah Lazarus avait du se mettre à courir. Des coups de feu venaient d'être tirés. Personne ne savait d'où venaient les balles, mais le danger était bien là. Dinah se mit à penser, en même temps qu'elle cherchait des yeux un endroit où elle pourrait se mettre à l'abri. Le marché Carmel n'offrait pas beaucoup d'abri, et elle n'était pas la seul à chercher où se protéger des balles qui sifflaient. C'était presque la fin février. Dans trois mois,DInah célèbrerait bientôt ses deux ans à Tel-Aviv . Avant son aventure sur un vieux raffiot , le "Dov Hos", qui avait mis cinq jours pour traverser la méditerranée, il y avait eu l'attente en Europe, la paperasse de l'Agence Juive, mais surtout, l'espoir.

"Ce n'est pas le moment de se faire descendre" se disait-elle. "être passée à travers la guerre,a travers les horreurs, l'indifférence,la haine, et finir tuée par une balle a quelques centaines de mètres de mon appartement de la rue Zamenhoff...."

Dans la tête de Dinah défilaient les souvenirs depuis son enfance jusqu'au début des hostilités. Son esprit avait occulté intentionnellement les scènes les plus douloureuses,son arrestation à Prague, sa déportation à Bergen-Belsen. Les souvenirs semblaient reprendre à partir du 15 avril 1945. Quelqu'un cria en hébreu: " ça vient du côté de Hassan Bek,ils sont au moins trois" . Dinah reprit sa course. Les mots en hébreu remontaient à la surface. Maison- Beit, amour-ahava, fatiguée-aiefa synagogue-Beit cnesset.... danger.....comment dit on danger déjà .....? ah, oui, sakana....

Dinah reprenaient doucement contact avec son passé. Avec les mots, refaisaient également surface des odeurs qui avaient la vie dure. Les odeurs ? Le gâteau au pavot tout chaud sortant du four, l'odeur du borschtsch bouillant au moment ou on met dedans une énorme cuillerée de crème fraîche, le fumet du bouillon de poulet.

Dinah savait qu'elle était en train de guérir. Depuis le moment où elle avait vu les premières affiches en hébreu après avoir débarqué du "Dov Hos", elle savait qu'elle ne pourrait qu'aller mieux. Elle avait par contre toujours du mal à admettre l'étrangeté de l'endroit où elle se trouvait.En plein mois de février, des hommes portaient des shorts et un drôle de petit chapeau sur la tête. On aurait jamais vu cela à Prague.....

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