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JULIETTE ET ROMEO

Fredo-le-Stéphanois avait juré fidélité à Micheline Abittan, une femme de chambre du "Sphinx", qui s'en était sorti et avait juré de gagner sa vie honnêtement.Elle était vendeuse de mode au Bon Marché. Fredo-le-Stéphanois, défavorablement connu sous le nom de Fréderic Grisoni, n'était Stéphanois que d'adoption.Le surnom de Frédo-le-Corse étant déjà pris, il s'était rabattu sur une autre région de France pour se faire un nom dans le milieu. Sur fond de trafic de cigarettes et de vente de coco dans certains cercles de jeux de la capitale, Joseph, le père de Fredo et Simon, le père de Micheline, étaient à couteaux tirés depuis déjà trois ans.


Pour se voir, ne restaient aux amants que les hôtels borgnes du côté de la rue d'Amsterdam, ou les boites louches de la place Blanche. Frédo ne le savait pas encore, mais Micheline devait lui annoncer qu'elle portait son enfant. Simon avait engueulé Micheline en la traitant de"fille de rien, qui fait un enfant dans le dos au fils se son pire ennemi". Chez les Abittan, on ne rigolait ni avec l'honneur du père, ni avec la vertu de la fille. Côté Grisoni, c'était la même chose. Lisandru, le père de Frédo, ne faisait pas dans la dentelle quand il s'agissait de la morale. Et pourtant, Frédo et Micheline se voyaient toujours, et toujours en cachette.


La boite avait mauvais genre, une sorte de bar où personne ne savait si la serveuse était un homme, ou si le barman était une femme. Mais Frédo et Micheline pensaient que c'était le meilleur endroit pour se rencontrer,certains que leurs pères respectifs ne mettraient jamais les pieds dans un bouge pareil. La porte du fond s'ouvrit soudain, donnant passage à un Lisandru Grisoni qui écumait de colère :"A machja, ochji un ha ma ochji teni., le maquis n'a pas d'oeil, mais vois tout." hurla LIsandru. Comment avait-il su? Qui avait trahi ? Dans les yeux de Micheline, Frédo pouvait voir de la détresse et un regard apeuré qui voulait dire " ne dis rien, surtout ne dit rien...."

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